« Anand Patwardhan est un documentariste d’Inde, qui a constitué depuis plus de trente ans une immense fresque cinématographique sur quantité de questions politiques, souvent controversées, au sein de la société indienne.
Primé dans le monde entier, il est aussi l’un des cinéastes les plus censurés de ces dernières décennies. Il n’en continue pas moins à s’attaquer aux conflits religieux, sous-développement, nationalismes exacerbés, puissances militaires et nucléaires… Anand met réellement sa caméra et toute son acuité au service de ceux qui se battent pour leurs droits élémentaires.
Déjà, étudiant, Anand se donne les moyens de ses ambitions : il voyage, de la fac de Bombay, où il a étudié la littérature anglaise, aux États-Unis, pour une maîtrise de sociologie, puis au Canada, où il poursuit son cursus en communication.
Anand ne reste pas sagement sur les bancs des universités et endosse très vite la panoplie d’un activiste. Il s’implique fortement dans le mouvement contre la guerre au Vietnam puis rejoint l’Union des travailleurs agricoles de César Chávez, grand syndicaliste chicano de Californie. Il tourne alors A Time to Rise (1981).
Revenu en Inde, il travaille ensuite à un projet éducatif et de développement, participe activement aux luttes anti-corruption, aux mouvements pour les droits civiques et pour les libertés démocratiques. S’emparer de la caméra ne l’a pas détourné de ces luttes, bien au contraire : ce sont toujours elles qui ont nourri ses films. Combats contre la paupérisation et pour le logement, contre l’hégémonie militaire et contre le nucléaire. Ainsi qu’un rejet de toutes les formes de nationalisme.
Les bidonvilles sont au cœur de Bombay, our City (1985), la montée du nationalisme hindou est à l’origine de In the Name of God (1992). Plus tard, War and Peace (2002) s’attaque au problème des armements nucléaires, et récemment, Jai Bhim Comrade (2011) est une longue investigation sur les violences autour des castes, en particulier le mouvement des intouchables, ou dalits. La rigueur extrême, l’exigence d’Anand, les controverses qu’il veut analyser, tout cela le mène bien souvent à des tournages qui s’étirent sur des années… Le film doit argumenter, étayer ces luttes, épauler ceux qui en sont les acteurs, et populariser leurs combats.
Beaucoup de ses films ont été un temps censurés par les chaînes de télévision étatiques indiennes, ou attaqués par des fondamentalistes de droite, dans son pays comme à l’étranger. À maintes reprises, Anand a dû mener des actions en contentieux, et défendre ses films devant des tribunaux avant de lever ces censures. Il a élargi ce combat en rédigeant un manifeste, Free for Freedom, en 2003.
Anand a fait l’objet d’un hommage au Cinéma du réel en 2013, et Nicole Brenez, historienne et programmatrice, esquisse fort bien en quelques mots sa force :
« Avec Anand Parwardhan entrent dans le cinéma le fracas des combats, la complexité des conflits, l’ampleur des mobilisations, les discours des meneurs et les chants des opprimés. » »
Texte extrait du site internet Bretagne et diversité >>> www.bretagne-et-diversite.net